Villa Windsor - Demeure du duc et de la duchesse de Windsor et de Charles de Gaulle

 

Paris, la ville lumière et ses monuments tant enviés de par le monde. Ils sont nombreux et plus ou moins célèbres. Parmi eux, se dresse un joli hôtel particulier, caché de la vue de tous au cœur du bois de Boulogne à la lisière de Neuilly-sur-Seine : la Villa Windsor. 

Longtemps oubliée, elle est réapparue à la mémoire de chacun en devenant un presque personnage de la série Netflix, The Crown. Et pour cause, elle fut pendant plus de vingt ans le théâtre de la vie mondaine du couple le plus sulfureux du XXe siècle : Edward VIII et Wallis Simpson, le duc et la duchesse de Windsor. Avant eux, elle fut la résidence privée d’un certain Charles de Gaulle. Après eux, elle fut louée par Mohamed Al-Fayed. Le riche homme d’affaires égyptien, fanatique des Windsor, y vit un projet : l’offrir à son fils aîné Dodi et sa petite-amie Lady Diana Spencer pour leur permettre de vivre leur histoire en toute discrétion.

La villa s’apprête aujourd’hui à ouvrir au public et à s’inscrire dans la liste des nombreux musées parisiens. En vous plongeant dans le passé de ce monument, je vous invite à découvrir une histoire franco-britannique unique où le lion anglais est l’ami du coq français.

 

L'installation du duc et de la duchesse de Windsor

2 juin 1953. L’Angleterre est en fête. Sa toute jeune reine Elizabeth II s’apprête à être couronnée au cours d’une cérémonie retransmise en eurovision. Le monde scrute religieusement sa télévision. Parmi les téléspectateurs, un duc et une duchesse qui, dans un salon parisien, ne manquent aucun détail. Il s’agit rien de moins que l’oncle de la souveraine, l’ancien roi d’Angleterre Edward VIII, et son épouse américaine Wallis Simpson.

Pour le Royaume-Uni, ce sacre est l’avènement d’une nouvelle ère elizabethaine. Cette année-là, pour le duc et la duchesse de Windsor, un nouvel avenir se dessine. Ils viennent de signer un bail de 25 ans à la mairie de Paris pour louer une villa située dans le bois de Boulogne.

Cette villa aux allures de demeure du XIXe siècle a pourtant été construite en 1928. Henri Liliaz, député des Basses-Pyrénées, avait obtenu le bail du terrain situé au numéro 4 de la route de Champ-d’Entrainement pour en faire construire une demeure secondaire. Amoureux des courses hippiques, cette maison lui permettait de se rendre facilement à l’hippodrome de Longchamps. Il confit alors les travaux à l’architecte Roger Bouvard. 

 

Avant de s’installer, Wallis revoit entièrement la décoration. Si elle doit vivre dans une nouvelle maison, elle met un point d’honneur à ce que l’intérieur reflète parfaitement ses goûts. Elle confie les travaux à Stéphane Boudin, directeur artistique de la prestigieuse maison Jansen. Le décorateur n’est pas un inconnu. Il avait déjà pris en charge la décoration des appartements privés du couple au palais de Buckingham. Il met en œuvre une décoration XVIIIe raffinée, offrant un écrin doré aux souvenirs du passé royal du duc.

 

Un passé royal tourmenté

Car oui, Edward fut roi. Il succéda à son père George V en janvier 1936. Mais ce grand amoureux des fêtes, de sa popularité et du libertinage était en fait un grand enfant, incapable de se soustraire à ses devoirs de monarque. Il fut surtout attaché aux éclats de la fonction. En plus de cela, il était en couple avec Wallis Simpson depuis 2 ans. Cette Américaine aux mœurs légères bientôt doublement divorcée ne pouvait convenir à l’Angleterre victorienne des années 30. Le gouvernement et la famille royale finirent par poser un ultimatum à Edward VIII : entre la couronne et Wallis, il doit choisir. Ce fut donc Wallis. En décembre 1936, il abdique pour épouser sa belle d’Amérique. Aussitôt mariés, le duc et la duchesse de Windsor s’envolent pour l’Allemagne et rencontre Adolf Hitler. Ils sont accueillis tels des souverains par le régime nazi. 

Pour certains, les sympathies pronazies du couple ne font aucun doute. Pour d’autre, ce voyage n’est qu’une erreur parmi tant d’autres commises par les Windsor à la veille de la Seconde guerre mondiale. Le gouvernement britannique ne savait que faire de ce couple qui dérangeait. En 1940, George VI, le frère cadet d’Edward qui lui a succédé sur le trône britannique, le fait gouverneur des Bahamas. Pour Edward et Wallis, la parenthèse Bahamas est vécue comme un calvaire. Au revoir la vie mondaine d’aristocrates, et bonjour l’ennuie dans un univers qui n’est pas le leur. Aussitôt la guerre terminée en 1945, les Windsor sont autorisés à rentrer en Europe. Ils s’installent à Paris dans un hôtel particulier situé boulevard Souchet. Mais très vite, il s’avéra trop petit pour accueillir leurs nombreuses soirées où le champagne coule à flot. C’est ainsi qu’ils posèrent leurs males Louis Vuitton flanquées de leurs chiffres dans la villa de Neuilly en décembre 1953.

Palais royal en villa

En passant le porche de la villa, les invités des Windsor découvrent un vaste hall sombre, éclairé par un lustre provenant de Fort Belvédère, la résidence préférée du duc pendant ses années de prince de Galles. Un imposant et élégant escalier mène aux appartements privés du couple. Le tout se trouve sous un plafond peint à la gloire des années de gouverneur des Bahamas d’Edward, sa dernière fonction officielle. Depuis le balcon du premier étage, l’étendard de prince de Galles salue les visiteurs. Une fois passé le hall, les invités sont accueillis dans le grand salon. Outre un portrait de la reine Mary, la mère chérie d’Edward, c’est surtout le bureau de l’abdication qui est mis en lumière au centre de la pièce. A droite du grand salon se trouve la bibliothèque dominée par un portrait de Wallis par Gerald Brockhurst. A gauche, se trouve la salle à manger dont les murs sont peints de chinoiseries du XVIIIe siècle. Toutes les pièces sont décorées de meubles Louis XV et Louis XVI et de mobiliers anglais du XVIIIe siècle où sont exposés quantité de bibelots et souvenirs de chacun. Leurs appartements privés ne sont pas en reste. Chacun dispose d’une chambre, d’un dressing et d’une salle de bains. Leurs deux appartements étant reliés par un salon central où ils aiment prendre leurs petits déjeuners ensemble. Au sous-sol se trouvent les cuisines et une vaste chambre forte où Wallis renferme ses célèbres bijoux Cartier.

 

Ce décor digne d’un palais royal est le théâtre de nombreuses soirées où le tout-Paris se presse. Mais entretenir une telle demeure, un train de vie dispendieux et 14 domestiques en liseré coute cher. Edward perçoit une rente allouée par le gouvernement britannique. Il est aussi à la tête d’une confortable fortune personnelle. Mais tout cela ne suffit pas. Il publie en 1955 ses mémoires qui sont un véritable succès littéraire. Wallis fait de même l’année suivante. Et en 1968, ils louent l’extérieur de la villa pour tourner Darling Lili de Blake Edwards avec Julie Andrews. L’Amérique n’est jamais loin… Edward accepte également ce tournage car le synopsis lui plait. C’est l’histoire d’une chanteuse anglaise invitée à se produire en France pour supporter l'effort de guerre pendant la Première guerre mondiale. Mais cette activité n'est qu'une habile couverture. Lili est en fait une espionne allemande dont la mission consiste à jouer de ses charmes pour voler des secrets militaires. Edward est encore aujourd’hui soupçonné d’avoir délivré aux Allemands les failles de la ligne Marginaux pour leur permettre de prendre facilement la France en 1940. Est-ce une coïncidence ? Le doute est permis… Quoi qu’il en soit, en toute discrétion, la villa fait son entrée à Hollywood.

Les derniers feux du couple ducal

Le 7 octobre 1971, la villa accueille des hôtes officiels : l’empereur Hirohito du Japon et son épouse. Le couple impérial est le seul à accepter de visiter publiquement le duc et la duchesse. Edward pose devant les objectifs au côté de l’empereur mais son état de santé ne fait aucun doute : le duc est malade. Il respire mal et s’amaigri très vite. Il souffre en réalité d’un cancer de la gorge. Une infirmière à demeure s’occupe de lui, d’autant qu’il est rapidement alité. Mais Edward tient bon. Il veut rendre ses hommages à sa nièce qui a prévu de lui rendre visite le 18 mai 1972 à l’occasion de sa visite d’Etat en France. Elizabeth II, accompagnée des princes Philip et Charles, arrive à la villa. La reine est accueillie par la femme à l’origine de la crise de l’abdication qui a eu tant de conséquences sur sa destinée. Elle se rend dans la chambre du duc qui l’attend assis dans un fauteuil, bien apprêté, les tuyaux qui le maintiennent en vie discrètement disséminés. L’entrevue ne dure que quelques minutes. Il se lève et s’incline devant sa reine. Elle descend ensuite boire un thé avec Wallis avant de repartir. Cette visite fut express mais met un point final à la vie d’Edward qui s’éteint une semaine plus tard.

Wallis lui survit 14 ans. Elle passe le plus claire de son temps seule dans ses salons de la villa où certains objets ont disparu de la décoration. La Couronne ayant récupéré une dizaine d’objets qu’elles considérait sa propriété. La duchesse rend son dernier souffle dans sa chambre le 24 avril 1986. L’intégralité de leur patrimoine est alors léguée à l’Institut Pasteur.

 

 

Mausolée-musée à la gloire des Windsor

La villa est vidée mais pas pour longtemps. Apprenant la nouvelle de ce lègue, Mohamed Al-Fayed rachète l’intégralité de ce patrimoine, obtient le bail de la villa pour 25 ans et s’attèle à redonner aux possessions des Windsor leur place d’antan. Il mène aussi une grande campagne de rénovation afin de sauvegarder la bâtisse tel un mausolée-musée à la gloire des Windsor. Ainsi naît la Villa Windsor, un nom inventé par Al-Fayed. 

Complètement fasciné par le couple, Al-Fayed embauche son personnel. Il refuse néanmoins de vivre dans leurs appartements. Pire encore, dans son quotidien, il refuse que ses pieds foulent le sol qui a supporté l’ancien roi d’Angleterre et son épouse. Il fait installer un tapis vert qui le mène directement de la porte d’entrée au second étage. Cette partie du bâtiment avait été désertée par Edward et Wallis. Al-Fayed fait donc aménager sous les combles ses propres appartements destinés à héberger toute sa famille. Mais le milliardaire égyptien réside peu dans la villa. Lors de ses séjours parisiens, il lui préfère une suite au Ritz, le célèbre hôtel de la place Vendôme dont il est propriétaire.

En reconnaissance de son investissement pour sauver la villa, Al-Fayed reçoit la Légion d’honneur et la grande plaque de la Ville de Paris en 1989. Le maire de l’époque, Jacques Chirac, se déplace en personne pour lui remettre lors d’une réception exceptionnelle donnée entre les murs de la villa où se pressent l’actrice Joan Collins ou même le comte Spencer. L’aristocrate est alors loin de se douter que ce lieu sera l’un des derniers à voir sa fille en vie.

 

Le dernier jour de Lady Diana Spencer

Le fils d’Al-Fayed, Dodi, débute une idylle avec lady Diana Spencer en juin 1997. Mohamed n’espère qu’une chose : que le couple médiatique se marie. Dodi aurait bien acheté une bague de fiançailles juste avant leur arrivée à Paris le 30 août. En fin de matinée, ils passent les grilles de la villa. Mohamed a insisté : ils voulaient leur faire visiter. Son projet secret est de faire de la villa la maison du couple formé par son fils et la princesse. Pendant 2h, Diana et Dodi vont de salle en salle, scrutent les bibelots des Windsor, symboles de leur vie royale passée. Diana est bouleversée tant leur malheur ressemble au sien. Ils déjeunent dans la salle à manger puis repartent dans l’hôtel particulier de Dodi rue Arsène-Houssaye. Quelques heures plus tard, leurs vies seront arrachées dans un brutal accident de la route dans le tunnel de l’Alma.

Cet accident est un tournent dans la vie de Mohamed Al-Fayed. Il se débarrasse des affaires des Windsor lors d’une grande vente aux enchères à New York en février 1998 qui disperse à jamais ces trésors historiques. En souvenir de son fils, il commence par faire installer dans les jardins une copie de la statue des magasins Harrods qui représente le couple mais finit par abandonner le projet. En 2018, il décide de mettre fin à son bail, laissant la propriété vide d’habitants.

 

Villa de Neuilly : logement de fonction de Charles de Gaulle

Un autre locataire célèbre y a pourtant vécu avant Mohamed Al-Fayed et avant même les Windsor : le général de Gaulle. 

Le 26 août 1944, une foule compacte s’est rassemblée le long de l’avenue des Champs-Elysées. Elle acclame son libérateur alors qu’il descend la plus belle avenue du monde. Six jours plus tôt, le général a quitté Alger d’où il menait la résistance depuis mai 1943. Il s’installe au ministère de la Guerre, rue Saint-Dominique. C’est ici que se constitue le 9 septembre le gouvernement provisoire qu’il préside. Pendant ce temps, son épouse Yvonne et ses filles, Elisabeth et Anne, sont encore à Alger. Elles attendent le feu vert du patriarche pour pouvoir rentrer en France en toute sécurité.

Le 23 septembre, le trio féminin embarque à bord d’un avion militaire avant d’atterrir au Bourget. A bord d’une voiture, elles traversent la banlieue parisienne dévastée par les bombes et les obus des derniers combats. C’est dans une France en ruine que les de Gaulle s’apprêtent à vivre. La voiture les conduit au 4 rue du Champ-d’Entrainement. Elles ne peuvent retourner à Colombey-les-Deux-Eglises. La Boisserie ayant été en partie détruite par les Allemands. Le général a choisi cette villa pour plusieurs raisons. Elle est ni trop loin de Paris, ni trop proche. Surtout, elle permettra à sa famille de vivre en toute quiétude, à l’abri des curieux. Qui de mieux que le général pour justifier son choix. Dans ses mémoires de guerre, il écrit : « Pour demeure, je n’ai pas voulu du palais de l’Elysée, marquant ainsi que je ne préjuge ni des institutions de demain, ni de la place que j’y prendrai. D’ailleurs, le train de vie qu’imposerait au général de Gaulle et que coûterait à l’Etat l’installation à l’Elysée serait choquant au milieu de la misère nationale. J’ai donc loué, à titre personnel, un hôtel particulier en lisière du bois de Boulogne sur le chemin de Bagatelle. » 

 

Maison de famille des de Gaulle

C’est d’ailleurs pour sa localisation que Herman Goering, le numéro 2 du régime nazi, aurait réquisitionné la villa pendant la Seconde guerre mondiale pour ses séjours parisiens.

Lorsqu’elle passe le perron de la maison, Yvonne s’exclame « elle est un degré au-dessus de ce que j’aurais aimé. » Pour autant, elle prend en main l’installation de sa famille. Seuls une gouvernante, une femme de chambre et une cuisinière sont là pour l’épauler. La vie quotidienne s’y organise comme le général le souhaite : paisible et austère, malgré les coupures de courant, le manque de chauffage et les tickets de rationnement.

Son fils Philippe de Gaulle est encore au combat. En avril 1945, une permission lui permet de retrouver sa famille dans la villa de Neuilly. Dans ses mémoires, l’amiral n’a pas manqué de décrire la maison à l’époque de ses parents : « Moderne et rectangulaire, cette maison de deux étages a une certaine allure classique. Les murs clairs sont pratiquement vides de tableaux et d’ornements. Le mobilier et les tapis modernes et confortables. Rien n’est luxueux. »

Tout le quartier entourant la villa est sécurisé par des militaires qui ne plaisantent pas avec le règlement. Pour franchir le barrage, le mot de passe est « Moscou ». Yvonne ne vit pas pour autant en recluse. Elle fait régulièrement des escapades dans Paris sans être reconnue où elle va au Bon Marché et fait la queue dans les magasins presque vides. Elle s’occupe aussi énormément de sa fille trisomique Anne qui fait de longues balades dans le jardin de la maison.

 

Le centre de ralliement des de Gaulle

Nombreux furent les neveux, frères et sœurs, à avoir souffert de leur côté de la Seconde guerre mondiale. Genevièvre de Gaulle, la nièce du général, fut arrêtée pour résistance et incarcérée au camp de Ravensbruck. Marie-Agnès de Gaulle, la sœur de Charles, avait elle aussi été incarcérée par les nazis. A partir de mai 1945, toute la famille de Gaulle se retrouve progressivement dans la villa de Neuilly pour se refaire une santé et vivre des jours heureux en famille sous la protection du patriarche. 

Le 9 mai 1945, Alain de Boissieu, ami du général et petit-ami de sa fille Elisabeth, rentre du Nid d’Aigle d’Hitler que les armées coalisées viennent de prendre. De Boissieu passe les grilles de la villa à bord d’une voiture spéciale : la Mercedes blindée du fuhrer. Si le général se contente de la regarder songeur, sa nièce Geneviève ne résiste pas à l’envie de s’assoir à la place d’Hitler, tel un pied de nez à celui qui a tenté de l’éliminer.

Pendant ce temps, Charles de Gaulle n’oublie pas sa carrière politique. Il entame un tour de la France libre. Dans chaque région visitée, les Français sont présents par milliers. En tant que président du gouvernement provisoire, il a en charge la reconstruction de la France. Il rentre bien souvent à la villa accompagné de son aide-de-camp Claude Guy et de sa secrétaire Elisabeth de Miribel. C’est entre les murs de la villa qu’il décide les nationalisations de nombreuses entreprises, qu’il crée la sécurité sociale, qu’il organise les premières élections où prirent part les femmes, et qu’il signa la grâce de Philippe Pétain après sa condamnation à mort.

Entre les murs de sa résidence, le général reçoit, mais les intimes uniquement. Seuls quelques politiciens comme Léon Blum, Georges Pompidou ou encore Félix Faure y furent conviés. Le général aimait surtout s’entourer d’intellectuels comme Malraux, Bernanos, Valéry ou Mauriac. Tous se retrouvent toujours après le dîner dans la bibliothèque pour fumer des cigares avec un verre de whisky. Au cours de ses discussions, le général prend la mesure de son impuissance face aux querelles et aux combines politiques renaissantes. Dans son esprit, la démission fait son chemin. Mais il ne l’annonce pas tout de suite. Sa famille s’apprête à vivre un heureux événement, il ne veut pas gâcher la fête.

Le 4 novembre 1945, jour de la saint Charles, sont annoncées les fiançailles de sa fille Elisabeth avec Alain de Boissieu. Le couple pose fièrement dans les salons de la villa. Trop heureuse de cet événement, Elisabeth ne résiste pas à se faire photographier dans le grand salon avant de devenir Mme de Boissieu. La jeune femme de 21 ans se prête au jeu du shooting photo. Le 2 janvier 1946, toute la famille de Gaulle se rassemble à nouveau à la villa pour les noces tant attendue. Elisabeth épouse Alain de Boissieu à la chapelle Notre-Dame de Sion. La réception a lieu dans la salle à manger de la villa. Le couple est ensuite accompagné à la sortie pour entamer leur voyage de noces. Au cours de ce voyage, le 20 janvier 1946, Charles de Gaulle démission de la présidence du gouvernement provisoire. Dès le lendemain, la famille quitte en toute hâte la villa.

 

Son aide-de-camp, Claude Guy, raconte : « Dès mon arrivée à la résidence de Neuilly, j’aperçois Mme de Gaulle qui traverse le grand hall, le menton appuyé sur une pile de livres qu’elle transporte d’une pièce à l’autre. Des ficelles et des papiers traînent. Quelques bagages près de la porte de l’entrée. Allées et venues de plantons consternés. 

Le Général descend, silencieux. Il essaie de bousculer le départ. Les bagages s’engouffrent dans la malle arrière. Mme de Gaulle s’assied dans la voiture. Le Général s’inquiète de ce que les dernières éditions du soir ne lui soient point encore parvenues. Dans un mouvement d’impatience, il renonce à monter dans la voiture, regagne son bureau du rez-de-chaussée, pour y lire les gazettes, qu’un motocycliste vient enfin d’apporter de la rue Saint-Dominique.

Quelques minutes plus tard, le Général monte dans la Cadillac de Roosevelt, que j’ai fait placer le dos tourné aux grilles. Nous disparaissons par la porte de derrière, traversant Bagatelle. Mme de Gaulle essaie de plaisanter ; le Général demeure prodigieusement silencieux. »

Les de Gaulle quitte cette résidence considérée comme un logement de fonction pour le pavillon de chasse de Marly. Pendant trois mois, ils y attendront la fin des travaux de rénovation de la Boisserie. S’en est fini de la vie républicaine de la villa.

Le duc et la duchesse de Windsor, le général de Gaulle, Mohamed Al-Fayed, Lady Diana… Tous ces personnages ont profondément marqué notre histoire. Peu de chose les rapproche, si ce n’est le privilège d’avoir passé la porte d’une villa du bois de Boulogne. Aujourd’hui, c’est cette histoire franco-britannique que la Fondation Mansart souhaite raconter. Depuis 2023, elle est en charge de la restauration de la bâtisse pour permettre à tout à chacun de découvrir de ses propres yeux les splendeurs de la villa Windsor.