La conspiration des Poudres

Et si le monde politique anglais partait littĂ©ralement en fumĂ© ? Cette idĂ©e paraĂźt tout droit sortie d’une thĂ©orie imaginaire voulant Ă©laborer un nouvel ordre britannique. Et pourtant, le Parlement anglais et le roi lui-mĂȘme ont bien failli ĂȘtre simultanĂ©ment assassinĂ©s, un jour de novembre 1605. Jacques Ier Stuart rĂšgne sur l’Angleterre depuis deux annĂ©es seulement, quand est divulguĂ© ce complot destructeur. Aujourd’hui connu comme la conspiration des Poudres, cet Ă©vĂ©nement historique non dĂ©nuĂ© d’importance politique reste encrĂ© dans la mĂ©moire britannique. La Bonfire Night fĂȘte chaque 5 novembre l’anniversaire de la conspiration Ă©vincĂ©e. Ces festivitĂ©s nationales permettent de garder en mĂ©moire le jour oĂč la monarchie britannique et son Parlement auraient pu ĂȘtre dĂ©finitivement dĂ©truits. Mais alors, pourquoi un tel devoir de mĂ©moire envers ce complot ?

L’heure est venue de vous dĂ©voiler l’histoire de la conspiration des Poudres, le jour oĂč la monarchie britannique faillit s’écrouler.

 

Le royaume uni rĂȘvĂ© de Jacques Ier

Elizabeth Ire Tudor meurt le 24 mars 1603. L’ñge d’or de l’Angleterre se dissout avec elle. La Reine Vierge ne laisse aucun descendant derriĂšre elle. Mais avant de mourir, la vieille reine Ă©ternellement cĂ©libataire avait rĂ©glĂ© sa succession. GrĂące Ă  l’intervention de son proche conseiller Robert Cecil, elle nĂ©gocie avec Jacques VI d’Ecosse afin qu’il lui succĂšde lĂ©gitimement. Le fils de sa meilleure ennemie Marie Stuart devient Jacques Ier d’Angleterre Ă  sa mort.

Durant son long rĂšgne de quarante-quatre ans, Elizabeth Ire rĂ©ussit Ă  confirmer et Ă  imposer durablement l’anglicanisme en Grande-Bretagne. La religion créée par son pĂšre Henri VIII en 1534 devient la religion d’Etat, gouvernĂ©e par le souverain d’Angleterre, et Ă©volue en un courant proche du calvinisme. Celui qui naĂźt dans la religion catholique, et se convertie Ă  l’anglicanisme durant son rĂšgne Ă©cossais, n’a qu’une chose en tĂȘte Ă  son arrivĂ©e sur le trĂŽne d’Angleterre : unifier pacifiquement ses royaumes. A dĂ©faut de devenir roi « d’Angleterre, d’Ecosse et d’Irlande », il porte dĂ©sormais le titre de roi « de Grande-Bretagne et d’Irlande ». L’unification de la Grande-Bretagne passe d’abord par son roi. Mais cet acte politique ne suffit pas. Une pluralitĂ© religieuse reste encore et toujours prĂ©sente sur les Îles britanniques. Le protestantisme est divisĂ© entre anglicanisme, presbytĂ©rianisme, puritanisme et bien d’autres sectes religieuses. Face Ă  ces courants protestants survit une minoritĂ© catholique sur le territoire d’Albion. L’unification souhaitĂ©e par Jacques Ier ne peut contourner ce problĂšme religieux.

A son accession au trĂŽne d’Angleterre, le roi se rĂ©jouit d’une rĂ©elle popularitĂ©. Sa descendance nombreuse, son dĂ©sir de paix, et son passĂ© catholique, offrent des espoirs utopiques aux catholiques et protestants d’Angleterre. Envers les catholiques, la tolĂ©rance, amorcĂ©e par la Reine Vierge, se perpĂ©tue. Aux yeux de Jacques Ier, seul compte le respect des lois et de l’autoritĂ© royale. Les persĂ©cutions catholiques ne sont plus Ă  l’heure de la politique anglaise. Sa relative tolĂ©rance engendre un espoir de conversion partagĂ© par les catholiques anglais. Mais le roi se montre peu enclin Ă  se convertir. Les mois passent, et Jacques Ier ne montre aucun signe qui indique une future conversion.

 

L’Angleterre anticatholique

En aoĂ»t 1589, Jacques Ă©pouse Anne de Danemark, une princesse luthĂ©rienne. Alors que le couple arrive au palais londonien de Whitehall en 1603, l’Angleterre se dĂ©chire religieusement. La prĂ©sence catholique agace les Anglais protestants, tandis que les catholiques veulent ĂȘtre reconnus et prospĂ©rer sur ces Ăźles. Le 19 fĂ©vrier 1604, la reine reçoit un chapelet de la part du pape. Son but ? EspĂ©rer rallier la reine et son Ă©poux au catholicisme. Jacques entre dans une colĂšre noire. Si les tentatives catholiques Ă©taient une rĂ©alitĂ©, jamais le Souverain Pontife n’avait osĂ© entrer dans l’intimitĂ© du couple royal pour parvenir Ă  ses fins. Ce cadeau est un dĂ©clique pour Jacques Ier. La tolĂ©rance catholique n’est qu’éphĂ©mĂšre. Le roi souhaite avant tout interdire ce catholicisme qui continue Ă  gangrĂ©ner l’Angleterre anglicane. Pour unifier ses royaumes, il n’a pas le choix. Il doit dĂ©sormais Ă©liminer les minoritĂ©s religieuses pour imposer durablement un anglicanisme surpuissant.

Le 19 mars 1604, le roi dĂ©voile sa politique religieuse dans un discours en la Chambre des Lords qui fait mouche. Il dĂ©clare vouloir professer la « vraie religion » sans pour autant ordonner des persĂ©cutions. NĂ©anmoins, ce discours farouchement anticatholique a l’effet inverse. Les persĂ©cutions populaires envers ces Anglais surnommĂ©s « papistes » en raison de leur fidĂ©litĂ© au pape augmentent, tandis que Jacques Ier leur impose des amendes. Cette politique radicale permet l’apparition de nombreux complots contre la personne du roi. C’est dans cette perspective de tentatives d’assassinat que naĂźt la conspiration des Poudres.

 

Un homme face au roi

Comprendre la conjuration des Poudres, c’est d’abord se tourner vers la vie d’un homme auparavant inconnu. Robert Catesby est un Anglais catholique de la gentry modeste frustrĂ©. Son pĂšre avait Ă©tĂ© persĂ©cutĂ© pour avoir refusĂ© de se conformer Ă  la religion anglicane, et pour avoir cachĂ© un prĂȘtre dans sa demeure. Il hait vĂ©ritablement la Couronne anglaise. Pour se venger, il prend part Ă  la rĂ©volte de Robert Devereux en 1601 contre Elizabeth Ire. Si Devereux est dĂ©capitĂ©, Catesby doit payer une lourde amande pour garder la vie sauve. Son grand espoir est de voir revenir l’Angleterre catholique. Pour cette raison, il se rend en Espagne auprĂšs du roi Philippe III, espĂ©rant qu’il envahisse l’Angleterre et restaure le catholicisme sur ces Ăźles. Mais le roi d’Espagne prĂ©fĂšre mettre un terme dĂ©finitif Ă  cette guerre qui dure depuis 1585 en signant la paix avec Jacques Ier. Déçu et dĂ©sespĂ©rĂ©, Robert Catesby ne voit qu’une possibilitĂ© au retour du catholicisme anglais : l’assassinat du roi et du Parlement.

Nous sommes en 1604, lorsque Robert Catesby dĂ©voile Ă  quelques fidĂšles son projet de faire sauter le Parlement anglais lors de l’ouverture d’une nouvelle session. Cet Ă©vĂ©nement politique d’importance a trĂšs peu changĂ© jusqu’à nos jours. En grande pompe, le roi entre dans la Chambre des Lords et prononce un discours qui annonce sa politique Ă  venir face aux pairs du royaume et au gouvernement. L’espace de quelques heures, le monde politique anglais se rassemble en un mĂȘme lieu. Le jour rĂȘvĂ© pour Robert Catesby de mettre son plan Ă  exĂ©cution. SimultanĂ©ment Ă  cet assassinat de masse, Catesby envisage d’enlever la princesse Elizabeth, second enfant du roi et troisiĂšme dans l’ordre de succession, qui vit dans l’abbaye de Coombe, prĂšs de Coventry. AgĂ©e de seulement huit ans, la conversion d’une enfant serait aisĂ©e. Durant la minoritĂ© d’Elizabeth, la rĂ©gence serait effectuĂ©e par le comte de Northumberland, Henry Percy. C’est donc pour mettre sur le trĂŽne la fille unique de Jacques Ier que Robert Catesby dĂ©cide de mettre en action son plan.

 

Organiser une conspiration d’envergure

EntourĂ© de Thomas Wintour, un Ă©rudit catholique qui a combattu aux Pays-Bas, John Wright et Thomas Percy, deux Anglais qui travaillent pour des comtes Ă  la fortune Ă©tablie, Robert Catesby commence Ă  organiser la conjuration. Le 20 mai 1604, le groupe d’hommes se rĂ©unis pour la premiĂšre fois dans une taverne londonienne. Ils jurent sur un livre de priĂšres de garder le complot secret. Mais pour arriver Ă  leur fin, les conjurĂ©s savent qu’ils ne peuvent rester seuls. Le recrutement de fidĂšles Ă  la cause catholique anglaise est urgent. Thomas Percy fait entrer au sein du groupe Guy Fawkes, un ancien militaire anglais qui avait combattu pendant la guerre de Quatre-Vingts ans aux cĂŽtĂ©s des Espagnols, au mois de juin. En octobre, Robert Keyes, un Anglais modeste, et Thomas Bates, un domestique de Catesby qui a accidentellement dĂ©couvert l’existence de la conspiration, viennent s’ajouter Ă  la liste des conjurĂ©s.

Le 24 dĂ©cembre 1604, un nouveau Parlement est formĂ©. Mais les dĂ©putĂ©s ne peuvent se rassembler avant le mois de novembre 1605. La peste qui sĂ©vit dans la capitale anglaise a raison de l’organisation des dĂ©bats parlementaires. Pendant ce temps, les hommes de Catesby en auraient profitĂ© pour creuser un tunnel sous le Parlement qui permettrait de relier l’appartement voisin de Catesby Ă  l’édifice. Mais aucune preuve de l’existence de ce tunnel n’a Ă©tĂ© trouvĂ©e. Seuls Thomas Wintour et Guy Fawkes divulguĂšrent cette information aprĂšs plusieurs heures de tortures.

En mars 1605, Robert Wintour, le frĂšre de Thomas Wintour, John Grant, le beau-frĂšre des Wintour, et Christopher Wright, frĂšre de John Wright, viennent s’ajouter Ă  l’assemblĂ©e des conspirateurs. Ensemble, ils dĂ©cident d’entreposer les trente-six barils de poudre dans une cave abandonnĂ©e du palais de Westminster. Mais le poids moral de ce complot pĂšse sur les protagonistes. Nombreux sont les hommes qui, Ă  l’exemple de Catesby, se confient Ă  des prĂȘtres en confession. Ces ecclĂ©siastiques, notamment celui consultĂ© par Catesby, leur interdit formellement de mener Ă  bien leur projet, mais en vain. La tĂȘte pensante du groupe continue Ă  attirer des disciples. Ambrose Rookwood, Everard Digby et Francis Tresham viennent terminer le nombre de conjurĂ©s, quelques mois avant le jour prĂ©vu par Catesby.

 

La trahison

En octobre 1605, les quinze comploteurs finalisent leur dessein dans des tavernes de Londres et Deventry. AprĂšs avoir gardĂ© les poudres dans la cave de Westminster, Fawkes doit allumer la mĂšche, puis s’enfuir en traversant la Tamise dans une barque avant de quitter le pays pour expliquer les Ă©vĂ©nements d’Angleterre aux puissances Ă©trangĂšres. Tout repose sur cet homme grand et fort, suffisamment robuste et sportif pour allumer la mĂšche et s’enfuir rapidement. Pendant ce temps, le reste des membres de la conspiration doivent crĂ©er une Ă©meute dans les Midlands afin de s’emparer de la princesse Elizabeth.

Mais il est un Ă©lĂ©ment que ces hommes n’avaient pas prĂ©vu. Le 26 octobre 1605, Lord Monteagle, noble catholique anglais qui emploie l’épouse de Keyes, reçoit une lettre anonyme qui lui conseille de ne pas se rendre au Parlement Ă  l’occasion du Discours du trĂŽne, auquel cas il se risque Ă  perdre la vie. PaniquĂ©, Monteagle dĂ©cide de montrer cette lettre Ă  Robert Cecil, comte de Salisbury, SecrĂ©taire d’Etat chargĂ© de la sĂ©curitĂ© de l’Etat. Salisbury dĂ©cide de ne pas alerter immĂ©diatement le roi de la dĂ©couverte du complot. Il prĂ©fĂšre attendre quelque temps afin de vĂ©rifier la vĂ©racitĂ© de ces dires en surveillant les prochains jours. InformĂ© de la trahison, Catesby cherche un coupable. Il pense Ă  Tresham, mais il lui assure ne pas ĂȘtre l’auteur de cette lettre. Les hommes de Catesby sont dans l’impasse. Que faire, maintenant que le complot a Ă©tĂ© mis au jour avant son exĂ©cution ?

 

La levée du complot

La lettre est montrée au roi le premier novembre. Il réunis le Conseil privé le lendemain et charge le Lord Chambellan Thomas Howard de fouiller le Parlement pour déceler tous les indices possibles. Néanmoins, les conjurés continuent à espérer mener à bien leur projet. Catesby, Percy et Wintour se réunissent une derniÚre fois le 3 novembre, alors que le reste des hommes participent à une chasse à Dunchurch qui sert de couverture pour enlever la princesse Elizabeth.

La premiĂšre fouille est effectuĂ©e par Suffolk, Monteagle et John Whynniard le 4 novembre dans et autour du Parlement. Dans l’une des caves, ils dĂ©couvrent un tas de bois de chauffage gardĂ© par un homme qui se dit s’appeler « John Johnson » et ĂȘtre un domestique de Thomas Percy. Il s’agit en fait de Guy Fawkes. Sans se soucier de la prĂ©sence de barriques de poudres derriĂšre ce bois, les enquĂȘteurs quittent le palais. Mais le roi n’est pas satisfait. Il ordonne une nouvelle fouille. Dans la nuit du 4 novembre, ces mĂȘmes hommes retournent dans les caves du Parlement. Ils trouvent une seconde fois Fawkes dĂ©sormais vĂȘtu d’un grand manteau, d’un chapeau et d’éperons. ArrĂȘtĂ© avec en main une lanterne et une montre Ă  gousset, Fawkes ne dĂ©voile pas son identitĂ©. Il continue Ă  s’appeler « John Johnson » et Ă  prĂ©tendre ĂȘtre un domestique de Percy. Une fois Fawkes arrĂȘtĂ©, les autoritĂ©s dĂ©couvrent la poudre en fouillant la cave anciennement gardĂ©e. DĂšs le lendemain, la dĂ©couverte conduit les enquĂȘteurs Ă  conduire Fawkes devant Jacques Ier.

 

La fin d’une conspiration inĂ©dite dans l’histoire anglaise

InformĂ©s de l’arrestation, les autres membres de la conjuration s’enfuient. A travers une pĂ©ripĂ©tie sur les terres de Grande-Bretagne chacun trouve un endroit oĂč se rĂ©fugier. Quand certains arrivent dans la demeure d’un membre de leur famille, d’autres se rĂ©fugient dans des villes plus ou moins proches de Londres. Pendant ce temps, la nouvelle de l’effondrement du complot se rĂ©pand Ă  Londres. La surveillance au sein de la capitale est renforcĂ©e et les ports fermĂ©s. Le comte de Northumberland, qui devait occuper la rĂ©gence de la princesse Elizabeth, est placĂ© dans une rĂ©sidence surveillĂ©e et un mandat d’arrĂȘt est lancĂ© contre Thomas Percy.

InterrogĂ©, Fawkes dit avoir voulu tuer le roi et le Parlement, tout en assurant avoir agit seul. L’enquĂȘte est alors confiĂ©e Ă  Sir John Papham, prĂ©sident de la Haute Cour de Justice et profondĂ©ment anticatholique. Il rĂ©ussit Ă  obtenir les noms des conjurĂ©s alors que Fawkes est transfĂ©rĂ© Ă  la Tour de Londres avec la poudre trouvĂ©e avec lui. Le roi demande Ă  ce que le prĂ©tendu « Johnson » soit torturĂ© et questionnĂ©, au vu de son entĂȘtement dans sa version des faits. BrisĂ© par des tortures destructrices, Fawkes finit par avouer les dĂ©tails du complot le 7 novembre.

Pendant ce temps, les fugitifs tentent d’obtenir des aides financiĂšres pour lever une armĂ©e contre le roi. Mais aucun noble n’est prĂȘt Ă  les aider. Certains se rĂ©fugient Ă  Holbeche House, alors que d’autres continuent leur pĂ©riple. DĂ©sespĂ©rĂ©s, ils tentent de se suicider en mettant le feu Ă  la poudre humide qu’ils avaient embarquer. Grant et Percy sont blessĂ©s, mais aucun ne rĂ©ussit Ă  se tuer. Une partie du groupe finit par continuer leur route, tandis que Catesby, Grant, les frĂšres Wright, Rookwood et Percy restent sur place et attendent l’arrivĂ©e des hommes du roi. AttaquĂ©s, John Wright, Catesby et Percy sont abattus, tandis que les autres sont arrĂȘtĂ©s, direction la Tour de Londres.

Durant les premiers interrogatoires conduits par Sir Edward Coke, la menace de la torture suffit Ă  les rĂ©soudre Ă  avouer leur rĂŽle dans le projet. Parmi tous les interrogatoires, seuls deux aveux sont entiĂšrement rĂ©digĂ©s : ceux de Fawkes et Wintour. Des aveux qui sont ensuite publiĂ©s en novembre dans le Livre du roi dans un compte-rendu rĂ©digĂ© Ă  la hĂąte. Le comte de Northumberland, considĂ©rĂ© comme le protecteur de la princesse Elizabeth si la conspiration avait rĂ©ussi, est dĂ©mis de ses fonctions, emprisonnĂ© Ă  la Tour jusqu’en 1621 et condamnĂ© au paiement d’une lourde amande. Tresham, quant Ă  lui, meurt dans sa cellule des suites d’une maladie avant de voir sa condamnation prononcĂ©e. Toutefois, sa tĂȘte est plantĂ©e sur une pique et exposĂ©e sur le pont de Londres.

Juger l’organisation d’un crime

Deux des trois prĂȘtres inculpĂ©s dans la conjuration en ayant cachĂ© les informations obtenues en confession rĂ©ussirent Ă  s’enfuir d’Angleterre. L’un d’eux est nĂ©anmoins arrĂȘtĂ© pour ĂȘtre jugĂ© avec les autres conjurĂ©s. TransfĂ©rĂ©s Ă  la Chambre Ă©toilĂ©e, le procĂšs de sept des protagonistes commence par la lecture de leurs noms. La famille royale tient Ă  assister dans l’ombre au procĂšs. Le prĂ©sident de la Chambre des communes, Sir Edward Philips, prend d’abord la parole pour dĂ©crire le projet des conjurĂ©s. Monteagle est largement remerciĂ© pour la dĂ©nonciation de la conspiration par le don de terres et d’une rente. Les juges n’hĂ©sitent pas Ă  lier ce complot aux jĂ©suites afin de justifier l’existence des lois anticatholiques en Angleterre, et Ă  mettre en avant le fait que l’explosion du Parlement aurait Ă©galement causĂ© la mort de plusieurs catholiques innocents.

Une fois les confessions et dĂ©clarations lues Ă  haute voix, les prisonniers prennent la parole. En chaque discours se tient une demande spĂ©cifique Ă  la cour. Thomas Wintour demande par exemple Ă  ĂȘtre pendu pour que soit Ă©pargnĂ© son frĂšre, tandis que Fawkes se dit non coupable. Autant d’interventions qui ne jouĂšrent pas en la faveur de ces hommes. Finalement, ils sont dĂ©clarĂ©s coupables de haute trahison et sont condamnĂ©s Ă  mort. Le roi et son gouvernement veulent marquer les esprits. Avant tout, il est nĂ©cessaire de montrer la puissance de la nouvelle Maison anglaise Stuart qui s’affirme avec force sur le trĂŽne d’Angleterre. Jacques Ier et ses successeurs ne doivent en aucun cas connaĂźtre une quelconque revendication par la suite.

Les exĂ©cutions commencent le 30 janvier 1606. Everard Digby, Robert Wintour, John Grant et Thomas Bates sont attachĂ©s sur des brancards et traĂźnĂ©s dans les rues bondĂ©es de Londres jusqu'au cimetiĂšre Saint-Paul. Les quatre dĂ©tenus, vĂȘtus seulement d’une chemise, sont castrĂ©s, Ă©ventrĂ©s, puis Ă©cartelĂ©s, avant d’ĂȘtre pendus. Le lendemain, Thomas Wintour, Ambroise Rookwood, Robert Keyes et Guy Fawkes sont pendus et dĂ©membrĂ©s en face du bĂątiment qu'ils avaient prĂ©vu de faire sauter, dans la cour du vieux palais de Westminster. Keyes n'attend pas le bourreau et saute du gibet, mais il survit Ă  sa chute et est emmenĂ© pour ĂȘtre dĂ©membrĂ©. Bien qu'Ă©puisĂ© par les tortures subies, Fawkes rĂ©ussit Ă  sauter et Ă  se briser le cou avec la corde, Ă©chappant ainsi au reste de son exĂ©cution. L'exĂ©cution du pĂšre Garnet a lieu le 3 mai 1606, mais contrairement aux conspirateurs, il n'est pas Ă©cartelĂ© et dĂ©membrĂ©. Sur instruction expresse du roi, Garnet est seulement pendu jusqu'Ă  ce que mort s'ensuive. La mort des prisonniers met officiellement fin Ă  l’épisode de la conspiration des Poudres, un Ă©vĂ©nement qui ne manqua pas de marquer les esprits britanniques.

La mort terrifiante des conspirateurs termine avec Ă©clat la conspiration des Poudres. Ce complot qui ne rĂ©ussit jamais Ă  arriver Ă  ses fins eut logiquement des consĂ©quences dans la politique entreprise par les monarques anglais. Le renforcement des lois anticatholiques en est la principale caractĂ©ristique. Plus que jamais, le roi d’Angleterre s’impose dans le paysage religieux des Îles britanniques. MalgrĂ© tout, le rĂšgne de Jacques Ier restera relativement tolĂ©rant envers les catholiques. Jamais il ne se rĂ©soudra Ă  la persĂ©cution de cette minoritĂ© anglaise. NĂ©anmoins, le contrĂŽle sur les catholiques continue Ă  se renforcer. A jamais dans la mĂ©moire collective, cette conspiration de personnages aux idĂ©es utopiques de retour du catholicisme en Angleterre ouvre de nouvelles possibilitĂ©s pour les Anglais contestataires. En l’espace de quelques instants la monarchie britannique instituĂ©e depuis Henri VIII aurait pu s’écrouler. Avec cet Ă©pisode de l’histoire britannique s’ouvre une pĂ©riode de contestation contre la monarchie Stuart, dont la PremiĂšre RĂ©volution d’Angleterre en est le paroxysme.  

 

Le saviez-vous ?

Le mot "guy", traduit en français par "gars", vient de Guy Fawkes. Alors que le conspirateur fait l'objet d'un rituel qui marque l'anniversaire de la conspiration, son prénom a progressivement été popularisé pour donner un terme générique afin d'évoquer une personne.

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